Selon une jurisprudence constante, en dehors des cas d’arrêt-maladie où le report est de droit (Cass. Soc., 16 février 2012, n° 10-21.300), la Cour de cassation estimait que le salarié qui n’avait pas pris ses congés payés pendant la période de prise, perdait ses droit à congés payés et s’il désirait obtenir judiciairement ces congés, il lui revenait d’apporter la preuve qu’il avait été mis dans l’impossibilité par l’employeur de les prendre (notamment Cass. Soc., 15 mars 2011, n° 09-69.893 et Cass. Soc., 25 mars 2010, n° 08-43.072).
Je n’ai jamais, mais alors jamais compris cette jurisprudence.
En effet, les textes disposent clairement qu’il revient à l’employeur de fixer les modalités de prise des congés payés (notamment les articles L. 3141-12 à L. 3141-16 du code du travail) : ce n’est pas le salarié qui choisit ses dates de vacances, mais l’employeur qui les lui impose. D’ailleurs, le salarié qui s’arrogerait le droit de choisir ses dates de congés payés pourrait être sanctionné (notamment Cass. Soc., 23 mars 2004, n° 01-45.225).
Bref, je n’ai jamais compris ces arrêts qui faisaient peser la charge de la preuve uniquement sur le salarié, surtout dans un domaine aussi important que le droit au repos.
La Cour de cassation a (enfin) opéré un revirement de jurisprudence concernant ce régime probatoire (Cass. Soc., 13 juin 2012, n° 11-10.929).
Dit autrement, il revient à l’employeur de pouvoir justifier d’avoir satisfait à ses obligations légales relatives à la fixation et la prise des congés payés.
Concrètement, les employeurs qui n’appliqueraient pas strictement la législation relative aux congés payés, ne peuvent plus retirer les droits aux congés payés des salariés n’ayant pas pris ces congés.
À nouveau, le droit communautaire est à l’origine de ce revirement (voir l’article relatif au forfait en jour et celui sur l’acquisition d’au moins 4 semaines de congés payés) ou, pour les plus critiques, en est le prétexte, puisque la Cour de cassation se fonde sur « la finalité qu’assigne aux congés payés annuels la Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 ».
Sources
L’arrêt de la Cour de cassation du 13 juin 2012
La directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003